dimanche 5 avril 2020

La saga des sorcières, tome 1 : Le lien maléfique d'Anne Rice - Ou les sœur Halliwell peuvent aller se rhabiller

Genre : Fantastique/Horreur
Année de parution : 1993
Edition : Editions Pocket (2012)
Format : Poche
Nombre de pages : 992 pages



Saga en 3 tomes (complète)


De quoi ça parle ? 


Sous le porche d'une vieille demeure à l'abandon de La Nouvelle-Orléans, une femme frêle et muette se balance dans un rocking-chair : Deirdre Mayfair est devenue folle depuis qu'on lui a retiré, à la naissance, sa fille Rowan pour l'envoyer vivre à San Francisco. Et derrière la grille du jardin, un homme, Aaron Lighter, surveille inlassablement Deirdre, comme d'autres avant lui, pendant des siècles, ont secrètement surveillé la famille Mayfair. Car ils savent que, de génération en génération, les femmes du clan se transmettent leurs maléfiques pouvoirs et que la terrifiante et fabuleuse histoire de cette lignée de sorcières ne fait que commencer...


La chronique


Anne Rice est une auteure dont j’ai beaucoup entendue parlé, notamment pour son travail autour du mythe du vampire qu’elle a totalement déconstruit. Elle est, en quelque sorte, la mère fondatrice du vampire moderne, beau, séduisant, parfois sacré. C’est une grande dame de la littérature fantastique, aussi ses écrits ont toujours attisés m’a curiosité. Maiiis, sa saga des vampires m’a longtemps posé un problème : elle est très très trèèèès longue. Je ne me suis jamais lancée dans l’aventure Anne Rice car trop effrayée pour m’engager dans une lecture aussi conséquente. J’ai toujours eu un problème à ce niveau : je déteste commencer une série et ne pas la finir, quand bien même je ne l’ai pas aimée. Sauf rare exception, je me sens obligée d’aller jusqu’à la conclusion, jusqu’au point final de l’auteur. Je ferme la boucle, fait, en quelque sorte, mon devoir de bonne conscience en me disant que « j’ai tout lu, donc je peux légitimement dire que c’était nul » (c’est très bête, on en conviendra). Aussi, j’ai longtemps hésité à me lancer dans l’univers d’Anne Rice, trop effrayée de m’emballer pour pas grand-chose et de me retrouver avec un style, une plume, un univers et des personnages qui ne me conviendraient pas. C’est là que j’ai fait la découverte, via Youtube, de la « saga des sorcières », une trilogie d’Anne Rice et, pour moi, une porte d’entrée inespérée dans l’imaginaire de l’auteure. C’est de son premier tome, Le lien maléfique, dont nous allons parler. 

Alors, par où commencer ? Je ne conseille pas Le lien maléfique à n’importe qui. Il s’agit clairement d’un ouvrage destiné à un public adulte avec le cœur bien accroché. On s’engage sur un premier roman d’un peu moins de mille pages, comment vous dire que c’est une brique qui peut, de par sa taille, en décourager plus d’un. Pas idéal pour une première lecture dans ce genre d’univers, donc, d’autant plus que rythme de l’histoire est très décousu. Anne Rice prend le temps d’installer une ambiance particulière au fil des pages, le livre regorge de description qui rendent le tout très immersif, on visualise très bien les personnages, l’univers particulier de la Nouvelle-Orléans au fil des siècles, de la vielle France et des colonies Françaises de Saint-Domingue. C’est très riche mais en même temps très lourd. On ressent comme des moments de pauses, comme des espèces de coupures publicitaires, qui ne sont pas toujours bienvenues, surtout quand on revient de quelques chapitres où l’intrigue avance peu. Parce que le temps est, à mon sens, le principal point noir de ce livre. 

Attention, Le lien maléfique a été une très bonne lecture. J’ai adoré l’univers mis en place par Anne Rice, je me suis régalée du charme tout particulier de ses personnages et est été subjuguée par l’ambiance très prenante de certains passages du récit. On a peur avec les personnages, on craint avec eux, on espère avec eux. Le récit nous épargne peu d’émotion, on navigue entre dégoût et émerveillement en l’espace de quelques pages et c’est très fort. Seulement, il faut reconnaître à ce récit quelques défauts qui, pour ma part, m’ont quelque peu gâchée l’expérience. L’intrigue de ce premier tome pourrait être découpée en deux parties : celle du présent avec les personnages d’Aaron, Rowan et Michael, et celle du passé de la famille Mayfair (le clan de sorcière que nous suivons). Les deux temporalités se chevauchent, en quelque sorte. Nous commençons l’histoire avec l’intrigue du présent et quelques portraits de personnages, on nous pose les bases de l’univers, on fait connaissance avec les héros du récit : bref c’est une introduction. Une introduction quelque peu fastidieuse, il faut rentrer dedans et pour moi ça n’a pas été quelque chose d’immédiat. Le début du Lien maléfique est un espèce d’épais brouillard, on nous pose beaucoup d’énigmes mais on nous donne que très peu de clés de compréhension. C’est un choix objectivement intelligent parce que ça apporte beaucoup à la suite de récit, la fin du livre est beaucoup plus dynamique et riche en rebondissement mais, ça rend aussi tous le début de l’intrigue particulièrement lourd. De plus, cette intrigue du présent et, à plus forte raison, son début, souffre de la comparaison avec celle de la famille Mayfair. Cette seconde intrigue débarque à mi-chemin et occupe facilement plus de quatre-cent pages. Elle se déroule sur deux-cent ans, on suit la famille Mayfair de ses origines à aujourd’hui, c’est une intrigue riche, trop riche peut-être car le reste m’a semblé bien fade une fois revenue à la temporalité de Rowan et Michael. On passe de Mayfair en Mayfair, de la première des sorcières à la dernière : Rowan. On jongle d’époque en époque et chaque membre du clan possède sa particularité, son charisme, son histoire, sa personnalité. Chaque « sorcière » aura ses moments de gloires comme d’échecs et je n’ai pas pu m’empêcher d’autant admirer que détester certains personnages. Nombreux sont ceux qu’on pense connaître et qui sont ensuite déconstruit dans le récit. Je me suis, par exemple, fait surprendre par des personnages comme Julien, Cortland, Stella et Carlotta qui sont d’une richesse incroyable. Cette intrigue du passé, vaste, est un peu comme un épisode de Secret d’Histoire, on plonge dans la vie de toute une dynastie, c’est presque documentaire dans son fond et, quand, enfin, on sort des dossiers secrets de la famille pour revenir à la dernière sorcière Mayfair et à ses aventure… On tombe un peu de haut. 

J’ai trouvé la seconde intrigue incroyable mais la première très pauvre. Je pense que cela vient essentiellement du fait que la première intrigue se déroule sur très peu de temps en comparaison de la seconde (quelques mois) et qu’elle est, au final, bien peu mise en avant en comparaison du reste. Sur plus de neuf cent pages, seuls quatre cents sont vraiment dédiés à l’évolution des héros présents, de ceux qu’on va, à priori, suivre tout au long de la saga. Rowan, notre personnage principal, est bien fade en comparaison de Stella, Mary-Beth ou Carlotta et son évolution est, paradoxalement, quelque peu expédiée sur la fin. J’ai eue beaucoup de mal à la suivre sur la dernière centaine de pages du récit : on ne comprend plus vraiment où elle en est, ce qu’elle ressent, ce qu’elle veut accomplir. Son histoire d’amour avec le personnage de Michael est, je trouve, très maladroite et tien en grande partie à l’attrait physique du personnage. Ils tombent amoureux trop vite, se déchirent trop vite, j’ai beaucoup beaucoup de mal à croire en leur amour, d’autant plus du côté de Rowan que je trouve particulièrement froide et rêche sous la plume d’Anne Rice (et juste super incroyablement frustrante sur le dernier tiers du récit). Cette première intrigue n’est pas si mauvaise, car elle pose beaucoup de choses intéressantes et possède son lot de personnages incroyables et attachants (Michael, Aaron, Pierce, Carlotta on pense à vous) mais est au final bien en-dessous de la seconde et c'est cette comparaison entre les deux qui rend l’histoire de Rowan et Michael un peu bof bof par moment. Je suis cependant très curieuse de la suite parce que la fin est une véritable claque. Si le déroulé a été quelque peu bancal, la fin rattrape beaucoup de choses et j’ai vraiment hâte de voir quelles tournures va prendre le scénario ! Est-ce que les rêves de Michael étaient vraiment des rêves ou un message prophétique de la suite ? Est-ce que Rowan est vraiment maudite ou est-ce qu’elle est une grande héroïne qui passe pour un gros caca (pardon Rowan, j’ai beaucoup de mal avec toi) ? Est-ce que « L’homme » nous a tous dit ? Est-ce que la famille Mayfair a révélé tous ses secrets ? Je ne sais pas et j’ai très très envie de savoir. Je compte donc me lancer dans la suite avec optimisme, prête à me laisser surprendre par Anne Rice dans les deux prochains tomes. 

Par contre, et c’est un point que je dois souligner : le livre est dur. Son rapport à la sexualité est… Souvent dérangeant. On parle d’inceste, de viol et même de banalisation du viol qui, personnellement, m’ont vraiment dérangé. Le personnage de Rowan est à ce niveau le pire et je pense que mon problème avec elle vient aussi et surtout de là. J’avoue que voir un personnage qui commence en disant « non » et qui finit par hurler « viole moi ! » bah, ce n’était pas très agréable et j’espère vraiment que cette façon de décrire la sexualité des personnages sera remanié parce que bah… C’est très maladroit. Je peux comprendre que sous le coup de plaisir on peut avoir de nombreux fantasmes, que par moment l’attrait du corps est si fort qu’on perd le contrôle mais putain… Quand pendant deux paragraphes l’héroïne défini son mec de pornographique parce que monsieur est en costume trois pièces, c’est lourd. Et c’est mon souci avec le sexe dans ce livre : c’est lourd, forcé, beaucoup trop appuyé et de façon très maladroite. Quand bien même horrible (je ne vous dis pas pourquoi), le désir qu’a le personnage de Petyr pour un autre personnage du clan Mayfair est bien mieux décrit et fluide dans la plume. C’est dommage, car ces passages avec Rowan sortent totalement du récit. C’est un peu le « nop » que j’ai avec la plume d’Anne Rice, je trouve que la sexualité de ses personnages en plus d’être trashouille pour pas grand choses est aussi super toxique et très maladroite. On peut écrire du cul sans avoir l’impression de mater un porno et ce serait bien que ce soit le cas ici. 

Mais bon, en définitive ça reste, dans sa majeure partie, un livre agréable, avec une histoire prenante et je continuerai la saga pour savoir de quoi il en retourne, je suis aussi curieuse de voir ce que donne également la saga des vampires, notamment sur son traitement de l’homosexualité dont j’ai cru comprendre que c’était un gros morceau aussi.

Ma note : 14/20

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