jeudi 16 juillet 2020

La saga des sorcières, tome 2 : L'heure des sorcières de Anne Rice - Ou ça aurait pu être parfait mais... Nan.

Genre : Fantastique/Horreur
Année de parution : 1995
Edition : Editions Pocket (2012)
Format : Poche
Nombre de pages : 800 pages





Saga en 3 tomes (complète)


De quoi ça parle ?


Des siècles durant, les sorcières de la famille Maqfair ont dû lutter pour survivre et fuir les persécutions. Aujourd'hui, elles vivent en paix à La Nouvelle-Orléans. Mais Lasher, l'esprit qui les hante depuis des générations, enrage de les voir peu à peu se détourner de la magie. Lorsque Rowan, la treizième sorcière, la puissante héritière des pouvoirs, est sur le point d'accoucher, Lasher sent que son heure est venue et rassemble tous ses pouvoirs pour s'incarner dans le nouveau-né. La nuit de Noël, Rowan donne naissance à un enfant prodigieux : en quelques heures, il acquiert sa taille adulte, parle et marche. La famille Mayfair pourra-t-elle faire face à cet esprit infantile, jaloux et diaboliquement intelligent qui rêve de devenir le plus grand sorcier de tous les temps ?

La chronique 


Il m'aura fallu du temps pour retourner vers Anne Rice et sa saga des sorcières. Le premier tome de la série m'avait laissée une impression moyenne (14/20 sur livraddict) en grande partie à cause du déséquilibre entre les deux trames de l'intrigue, celle du présent et du passé, que je trouvais très inégales en matière de qualité. J'étais tout de même curieuse de connaître la suite, d'autant plus que la fin du tome un nous avait laissés sur un gros retournement de situation et l'arrivée dans le monde physique de Lasher, la créature de l'ombre du clan Mayfair. 

Je trouve ce second tome d'une bien meilleure qualité que le premier... Malheureusement, je suis également très en colère contre ce livre et les messages qu'il délivrent. Dans ma chronique du tome un, j'avais soulevé ma gêne quant au traitement de la sexualité dans certains passages du livre. Anne Rice nous conte une histoire plutôt trash, où viol, incestes et relations toxiques sont légion. Ce n'est pas tellement un problème en soi parce qu'à aucun moment du roman, ces pratiques étaient décrites comme étant acceptables, il s'agissait de la réalité de la famille Mayfair et, au travers des yeux du Talamasca, on voyait bien qu'il y avait un problème. Là où ça avait capoté pour moi, c'est en fin de tome avec le personnage de Rowan et sa relation avec Lasher, au début particulièrement véhémente et contre le fait d'être touchée par la créature, il n'a fallu à Lasher que quelques caresses forcées (donc attouchement non consentit youpi) pour que notre héroïne écarte les cuisses et hurle "VIOLE MOI". J'avais été particulièrement choquée par la façon dont les choses ont été décrites. C'était maladroit et surtout très problématique parce que toute la relation Lasher/Rowan tournait autour du fait que "c'est ok de forcer, la meuf aimera de toute façon". C'était la raison pour laquelle je m'étais refusée à mettre plus de 14 à l'époque. Aujourd'hui, après avoir dévoré le second tome de la saga, je peux vous dire que s'il est bien meilleur en matière d'ambiance et d'histoire, il est également bien pire dans son traitement de la sexualité. Si le tome un était gênant, le tome deux est clairement problématique. 

Toutes les relations sexuelles explicites (donc décrites) que vous verrez dans ce livre sont des viols qui ne sont jamais nommés. On appelle ça "faire l'amour" hors ce n'est en rien faire l'amour que d'agresser sexuellement quelqu'un. 99% des relations sont non consenties, grandement forcées par les protagonistes masculins. Les rares fois où le mot viol est cité pour décrire de tels actes, ils sont tout de suite adoucis par un second rapport (donc avec le même homme, le violeur) qu'on nomme "faire l'amour". Je trouve ça tout bonnement dégueulasse, encore plus venant d'une femme. Alors, ok, la saga des sorcières n'est pas toute jeune, ça joue aussi, mais ce n'est en rien une excuse valable. On n'a pas attendu 2020 pour qualifier le viol d'agression et je trouve particulièrement grave qu'il n'y ait aucun recul vis-à-vis de cela dans le roman.  Ça me choc d'autant plus que je vois très peu de commentaire soulevant ce problème... J'ai l'impression d'être la seule à avoir été profondément dégoûtée par cet aspect-là du livre. Outre les viols répétitifs et jamais nommés, on n'a aussi la grande joie (Lol) de découvrir une relation pédophile qu'on tente de faire passer pour légitime parce que "la gamine de 13 piges est mature vous comprenez". Je... Je ne suis pas du tout d'accord. Ajoutez à ça que les scènes de sexes sont d'une lourdeur affligeante à coup d'expression comme "pilonner" (parce que oui, c'est bien connu, le sexe ça se résume à "pilonner" sa partenaire tel un ouvrier des BTP, tout va bien) et vous obtenez la douce sensation de lire une fan fic érotique écrite par une quinquagénaire frustrée de sa vie sexuelle. Absolument charmant. 

Ce qui me pose problème, ici, ce n'est pas en soi la présence de sexes, d'inceste (parent/enfant, je précise) ou de pédophilie : nous sommes dans une fiction. Non, ce qui me pose problème c'est que toutes ces pratiques ne sont jamais remises en cause ou définies comme "dangereuses", "illégales" ou même "problématiques". Un jeune lecteur (ou même une jeune lectrice) qui n'a reçu aucune éducation sexuelle (et Dieu sait qu'ils sont nombreux) n'aura pas le recul suffisant pour comprendre que les rapports décrits dans le livre ne sont pas ok. Autrement dit, c'est un message dangereux. On peut parler d'inceste comme dans Forbidden ou de pédophilie et de viol comme dans Prince Captif sans glorifier ces pratiques. Pour la pédophilie et le viol, notamment, on peut en montrer tout en donnant au moins un point de vue, au moins une phrase qui condamne l'acte. Là, on n'a rien. Que dalle, Nada. Et ça me pose problème. Ça fait de l'heure des sorcières un livre dangereux. Et c'est bien dommage, parce que cet aspect mis à part, le livre est excellent. 

La plume d'Anne Rice est brillante quand il s'agit de poser un cadre et une ambiance. On plonge dans l'univers, on visualise la Nouvelle Orléans, L'Écosse à l'époque d'Elizabeth, la vieille Italie avec une fluidité et une facilité super-troublante. Ce second tome c'est l'occasion de voyager, d'en apprendre plus sur le passé de certains personnages et l'histoire de certains lieux. On explore toute une nouvelle branche de la famille Mayfair mais surtout l'histoire de la famille du point de vue d'un de ses membres (et pas des moindres) : Julien. Ce tome, c'est aussi le grand retour de Lasher dans le monde des vivants et surtout, enfin, la vérité dévoilée quant à ses origines et son histoire. On lève le voile sur de nombreux mystères et on offre à nos personnages des fins qui m'ont, pour la plupart, toutes convaincues. Le seul qui m'a un peu laissée perplexe, c'est Lasher, dont je ne comprends pas trop l'évolution entre le début et la fin de l'histoire. On peut considérer ce tome deux comme étant la fin d'un cycle, puisque, d'apparence du moins, de nombreuses intrigues sont closes. On nous laisse cependant une porte ouverte puisque les origines de Lasher nous révèlent l'existence d'une race de créatures intelligentes : les Taltos. 

Le livre aurait pu être parfait sans tout l'aspect problématique de la sexualité. Je sais que ma chronique est, pour le coup, plus axée sur cette partie que l'histoire en elle-même, mais je ne peux décemment pas passer à côté et vous chanter les louanges d'un livre ultra dangereux quand on n'a pas le recul nécessaire pour différencier un comportement ok d'un comportement condamnable par la loi. C'est la raison pour laquelle je vais mettre la note de 13/20 au livre. 13 points pour la qualité du titre 7 points en moins pour la purge qu'est la sexualité dans ce bouquin.

Ma note : 13/20

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