dimanche 31 mai 2020

Ondine de Benjamin Lacombe - Ou l'enfer pavé de bonnes intentions

Genre : Mythe/Tragédie/Romance/Album
Année de parution : 2012 (2017 dans la version traitée)
Edition : Editions Albin Michel
Format : Album
Nombre de pages : 40 pages

De quoi ça parle ?


Benjamin Lacombe revient avec le mythe d’Ondine à ses amours romantiques et pré-raphaélites. Inspiré par les textes de Friedrich de La Motte-Fouqué et la pièce de Jean Giraudoux, il propose sa version du conte, où prédominent des images très picturales faisant écho aux peintures de Millais ou Waterhouse. Par un savant jeu de calques imprimés, il fait émerger toute la sensualité et la transparence de cet univers aquatique. Vibrant pour le beau chevalier Huldebrande, Ondine se noie dans les tumultes de l’amour, ses marivaudages et ses trahisons. Un grand conte, une épopée romantique dont les thématiques résonnent de manière étonnamment moderne.

La chronique 


Une petite découverte faite en bibliothèque et qui m'a attiré l’œil de par les dessins incroyables de Benjamin Lacombe. Je ne suis pas du tout familière avec le genre de l'album, et encore moins au conte d'origine d'Ondine, aussi cette lecture a fait office, pour moi, de crash test. Je l'ai d'ailleurs faites à voix haute, avec ma petite sœur. 

On suit l'histoire d'Hans, jeune et beau chevalier du Royaume de Ringstetten qui, suite à un défi lancé par la belle Ursule, Princesse du Royaume, explore la sombre forêt proche de la capitale, et dont on dit qu'elle regorge de mauvais esprits. C'est dans ce cadre quelque peu cauchemardesque qu'Hans fera la rencontre d'Ulrich, un vieux pécheur habitant dans les bois, et de sa famille, dont sa fille adoptive : Ondine. 

On est face à une histoire me rappelant sous plusieurs aspects le mythe de la petite sirène. Ondine est une fée des eaux, un être surnaturel, recueillie à la naissance par un couple d'ambles humains. Elle est belle, changeante, mais surtout elle n'a qu'une ambition : celle d'obtenir une âme. Cette âme, seul l'amour d'un être humain (au sens romantique du terme) peut la lui donner. Vous l'aurez compris, on est ici sur une histoire d'amour. Ondine et Hans vont très vite tomber amoureux et cette âme qu'Ondine souhaite avoir, sera très vite transformé par le désir simple de toujours rester au côté de l'être aimé, et ce, dans un bonheur perpétuel. Sauf que, vous vous en doutez aussi, tout ne se passe pas comme prévu. Ondine a un lourd héritage, celui du peuple des eaux, un héritage qu'Hans va devoir lui aussi porter une fois lié à sa dulcinée. On a un petit côté Roméo et Juliette dans le récit, puisque cet amour paranormal (Ondine n'est pas humaine, après tout.) ne sera pas au goût de tous. 

L'histoire brasse de très nombreuses thématiques, et comme tous les contes chacun y trouvera sûrement un message/une morale différent(e). Personnellement, je vois dans l'histoire d'Ondine un investissement à l'engagement rapide, fait sous le coup d'une impulsion forte. Aimer, et à plus forte raison s'engager avec quelqu'un, a des conséquences. Il n'est pas seulement question de la personne, mais aussi de ses croyances, de sa famille, de sa Vision du Monde et de la vie. Je vois aussi dans l'histoire d'Ondine, un investissement à la bonté trop prononcée. Tout au long du récit, Ondine donne, cherche à offrir bonheur et épanouissement à son entourage sans réellement le consulter d'abord. L'enfer est pavé de bonnes intentions et Ondine illustre très bien ce proverbe, détruisant, alors qu'elle ne cherchait que son bonheur, la vie d'une amie chère. C'est une interprétation que je pense intéressante, car je ne trouve pas de réel antagoniste dans le récit que les personnages en eux-mêmes. Ondine, qui à vouloir trop, ne fait rien bien. Hans, qui se laisse trop guider par ses impulsions au point d'entraîner l'irréparable. Ursule, qui se perd entre affection et manigance, jalousie et réelle bonté. Ce sont les démons intérieurs de chacun de nos protagonistes qui vont conduire à la fin plus que tragique du récit. 

De par ses thèmes et son ton, Ondine n'est pas un récit à mettre entre les mains des tous petits. J'y vois, par contre, un grand intérêt pour des enfants un peu plus grands, voir un public adolescent et adulte. C'est une très belle histoire, qu'on peut interpréter de mille façons différentes et, au-delà du fond, le travail sur la forme est incroyable. Cet album est un très bel objet de collection, Benjamin Lacombe a beaucoup travaillé sur ses illustrations, jouant avec des calques pour donner une profondeur plus importante aux images et un côté presque "animé" à ses pages illustrés. Le travail éditorial mené par Albin Michel est exceptionnel sur cet ouvrage, c'est beau, simple et relativement accessible. Avoir un objet beau livre pour 19€ c'est agréable. 

Lire cet album a été une très belle expérience. Outre le conte, que je trouve assez touchant, j'aime beaucoup l'idée de pouvoir débattre des messages que les uns et les autres ont trouvés suite à la lecture. C'est une expérience visuelle très agréable, le style de Benjamin Lacombe donne un côté un peu mélancolique au récit, certaines images appuient la violence et la beauté tragique de certaines scènes. Je pense que n'importe qui peut prendre plaisir à parcourir ce livre et je ne peux que vous encourager à le feuilleté en librairie, voire même à vous laisser tenter.

Ma note : 18/20

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