mercredi 17 juin 2020

Shikanoko, tome 3 : L'empereur invisible de Lian Hearn - Ou enfin on avance (enfin)

Genre : Fantastique/Médiévale japonais/ Aventure
Année de parution : 2017
Edition : Gallimard (Jeunesse)
Format : Grand Format Broché
Nombre de pages : 304 pages

Série en quatre tome (Complète)

De quoi ça parle ? 


Shikanoko, le guerrier au masque de cerf, vit désormais retiré dans le Bois Obscur, pleurant la disparition de la Princesse de l'Automne. Livrés à eux-mêmes, les cinq garçons dont on lui avait confié l'éducation en profitent pour explorer l'étendue de leurs pouvoirs magiques... Hina doit aujourd'hui se cacher. Elle est placée sous la protection de dame Fuji, la maîtresse des bateaux de plaisir. Elle seule sait où se trouve le véritable empereur... La saga épique de Lian Hearn se poursuit, puissante, envoûtante : dans ce nouveau récit, les pièces maîtresse de l’échiquier se mettent en place. Les sombres intrigues de pouvoir menacent plus que jamais de tarir la source claire des sentiments.

La chronique 


ENFIN. Voilà, je ne vois pas meilleur mot pour résumer la chronique qui va suivre. Comme quoi, la persévérance, ça paye. Après deux tomes maladroits dans le meilleur des cas et ennuyeux à mourir dans le pire, j'avoue m'être plutôt résignée à finir cette saga dans la douleur. Malgré les rebondissements de la fin du second tome, qui présageait un vent de fraîcheur dans la série, j'avais vu pas mal d'avis négatifs/mitigés sur la seconde partie de cette quadrilogie. Aussi, je ne m'attendais pas à de grandes choses, en tout cas à rien de bien positif et... Bah force est de constater que... Bah... Ce n'était pas si mal, en vrai. C'est même le meilleur tome que j'ai lu jusqu'à maintenant ! 

Ce tome trois reprend après les bouleversements des derniers chapitres du second tome. Akihime est morte, Shikanoko à, une fois de plus, échoué dans sa quête et s'exile donc par la force des choses dans les Bois Obscur, prisonnier, une fois encore, du masque. De leur côté, les enfants de l’araignée se séparent du seul père qu'ils n'aient jamais connu pour affronter le monde. Si on retrouve un début assez classique dans les premiers chapitres, Lian Hearn fait très vite le choix d'imposer un véritable bond dans le temps à ses personnages. Ce bond temporel est continu, on voit l'évolution de la situation de nos héros par petites touches, tant et si bien que près de douze ans s'écoulent entre la première et la dernière page du récit. On ne va pas se mentir... Je crois que c'est ce qui sauve la série. On ne peut pas vraiment dire que c'est une ellipse, car on voit le temps s'écouler, on suit nos personnages ponctuellement au cours des douze années que traitent ce troisième volet et c'est peut-être cette nuance qui rend le tout satisfaisant. On voit l'évolution et surtout le comment du pourquoi de cette évolution.  Nos personnages mûrissent, tant du point de vue de l'âge que de la mentalité, cet écoulement du temps, permet aussi à nos héros de compléter certains arcs narratifs de façon crédible (comme le deuil d'Akihime de la part de Shikanoko, la descente aux enfers d'Arimoto, la perte de la naïveté d'Hina, etc.). Ce qui aurait pu être un traitement de personnages expéditifs si on était restés dans la même temporalité, devient un traitement beaucoup plus logique. Nous n'avons plus des enfants face à nous, mais de jeunes adultes avec un bagage émotionnel et une histoire déjà lourde. Bref, ça m'a rendu le casting beaucoup plus sympathique, même si le livre est loin, très loin, d'être parfait.

Outre l'aspect bénéfique qu'a cette évolution de la temporalité sur les personnages, en termes d'histoire, ça permet aussi d'avancer dans le récit. Yoshi est désormais adulte, par exemple, de même que Take qui n'était qu'un simple nouveau né dans le tome 2. Ces changements impliquent beaucoup de nouvelles choses, on insiste aussi à toute la formation de Mu, un des fils de l'araignée, la prise de pouvoir de Kiku, etc. Bref, le monde change évolue, bouge, ce qui manquait cruellement dans les premiers tomes, notamment le second. J'ai trouvé les différentes intrigues intéressantes et je trouve que le traitement des personnages est de bien meilleures qualités que ceux qu'on avait au début de la série. Je vois un peu les deux premiers tomes comme une introduction très fastidieuse mais essentielle pour comprendre réellement l'essence de certains personnages et des événements qui leur sont liés. Je trouve également que l'aspect fantastique du récit est nettement plus convaincant, notamment par le biais de Mu et des Tengus qui permettent vraiment au traitement du monde occulte d'être toujours présent et bien encadré. 

Ceci dit, le livre n'est pas tout beau tout rose, loin de là. Si cet avancement du temps est positif en matière d'évolution il est plutôt brouillon dans sa forme. À force de jongler d'un personnage à l'autre, on se perd un peu. On navigue dans ces douze années écoulées de façon un peu anarchique et franchement... Bah parfois c'est un peu anarchique, justement et le style de Lian Hearn (ou la traduction, je ne sais pas laquelle est à blâmer) est toujours aussi peu attractif. C'est un défaut dont je ne pense pas être débarrassée : j'ai du mal à m'impliquer émotionnellement dans cette histoire. Pourtant, je trouve qu'on a franchi un cap en matière de qualité. Je suis nettement plus convaincue par le personnage d'Hina que par celui d'Akihime, par exemple. Je la trouve plus juste, plus intéressante. On va notamment explorer avec elle la vie de courtisane, un univers qui m'intéresse beaucoup à titre personnel. Avec Yoshi, également, on va explorer un peu sa vision des choses, entre ce qu'il est et ce qu'il souhaite être avec les saltimbanques. Le clan de l'Araignée offre également des personnages très intéressants, des êtres à la croissance rapide, devenus hommes avec la maturité et l'expérience de jeunes enfants. Bref, il y a du bon et de l’intéressant, un réel regain d’intérêt pour la saga.

Je trouve cependant dommage d'avoir attendu aussi longtemps. Attendre la moitié d'une série pour enfin réellement la démarrer c'est un peu gonflant et, malheureusement, même si j'ai été agréablement surprise par ce tome-ci, les lourdeurs de ses deux grands frères et l’antipathie que j'ai pour les personnages font que je ne pense pas apprécier la saga comme j'aurai aimé. À moins d'un quatrième et dernier tome incroyable de la première à la dernière page, je pense ressortir de ces lectures une expérience plutôt moyenne, sympa au mieux. Et c'est dommage, parce que j'avais réellement de très bons souvenirs du clan des Otori.

Un petit mot de dernière minutes : en matière de romance, je suis agréablement surprise de voir de la représentation gay. Bon, elle est très discrète, pas du tout mise en avant, mais elle a le mérite d'exister. On a le droit à un couple d'hommes qui n'est jamais remis en question. Par contre, je regrette un peu le second "couple" gay, en fait il s'agit plus de deux jeunes hommes qui découvrent la sexualité ensemble et si on voit une affection particulière entre eux, ça ne va jamais plus loin. J'aurais aimé, peut-être, qu'on creuse un peu plus leur relation et ce qu'elle implique, mais ça on pourra en reparler dans le tome 4 ;)

Ma note : 15/20

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